LIVRET : Rémi De Vos  

MUSIQUE : François Miquel 

MISE EN SCÈNE : Rémi De Vos 

CHOREGRAPHIE et ASSISTANTE à la MISE EN SCÈNE : Alma de Villalobos 

COSTUMES : Camille Pénager 

SCÉNOGRAPHIE : Pierre Lebon

Avec

LES RÉSIDENTS DES TOURNESOLS : Edwige Bourdy, Bernard Pisani, et Pierre Méchanick 

LE PERSONNEL DES TOURNESOLS : Gilles Bugeaud, Pauline Gardel et Emmanuelle Goizé 

CLARINETTE, CLARINETTE BASSE, SAXOPHONE ALTO : François Miquel 

CONTREBASSE : Tom Laffolay

ACCORDEON : Laurent Derache

 

PRODUCTION : compagnie Quand On Est Trois           CONTACT :  06 95 85 73 86 quandonest3@gmail.com 

 

Création 2022/2023

 

Après avoir connu un large succès avec AZOR et OH-LA-LA OUI OUI ( Théâtre de l'Athénée 2017 et 2019 ), la compagnie Quand On Est Trois récidive avec une création originale : LES TOURNE- SOLS, comédie lyrique. Exercice de haute voltige théâtral, archétype fabuleux, inspirant à la fois méfiance et admiration mais garant d'une idiotie irrésistible et réjouissante, l’opérette nous a tou- jours inspiré. Nous l'avons souvent dynamitée, il était temps d'en créer une à notre envie.

Nous avons demandé à Rémi De Vos d'en être l'auteur parce qu'il est, par filiation becketienne, le plus à même de transformer la comédie de l'absurde en poème tendre de la tragédie humaine. Le sujet de la pièce est venu des profondeurs de nos angoisses communes et de nos émerveille- ments d'enfants ; nous pouvons le résumer ainsi :

 
La canicule sévit en ce mois de juillet et l'effervescence est à son comble car le Tour de France va passer devant la maison de retraite Les Tournesols. Résidents et employés veulent assister au passage des coureurs, exceptée la directrice qui n'a en tête La canicule sévit eLa canicule sévitn ce mois de juillet et l'effervescence est à son comble car le Tour de France va passer devant la maison de retraite Les Tournesols. Résidents et employés veulent assister au passage des coureurs, exceptée la directrice qui n'a en têteque la santé de ses pensionnaires. A ce titre, elle aimerait bien connaître la cause réelle du décès du doyen des Tournesols : a-t-il étouffé sous la chaleur ou sous l'étreinte amoureuse de sa voisine de cou- loir ? Difficile à savoir, d'autant que cette enjôleuse octogénaire est atteinte d’un Alzheimer qui lui vaut tous les alibis et que le seul témoin potentiel est sourd comme un pot. Une in- toxication alimentaire générale viendra compliquer un peu plus la vie de l’établissement.
 
 

Rémi De Vos s'est emparé de ce sujet avec gourmandise. L'appétit venant en mangeant, il s'est pris au jeu des contraintes du genre : écrire les paroles des chansons, travailler avec des chan- teurs, trouver la place dramaturgique de la musique et des chorégraphies. Vint alors l'évidence : l'auteur Rémi De Vos sera aussi le metteur en scène du spectacle .

Pour composer la musique de LES TOURNESOLS nous avons choisi François Miquel. Brillant clari- nettiste et merveilleux pianiste, François nous a souvent accompagnés sur les scènes lyriques. Et puis, nous avons découvert ses compositions ( pour le Faust, une légende Allemande ", 1926 ), ses orchestrations, et nous avons adoré sa musique. Résolument contemporaine, elle n'en est pas moins imagée et émouvante. Tout ce que nous voulions pour notre création. L'instrumentarium proposé par François ( Clarinette, contrebasse et accordéon ) donnera une palette de couleurs étonnantes, à la fois sombres et brillantes, douces et éclatantes.
François sait dans quoi il s'embarque, il a dit oui. C'est un ami.
     

La compagnie Quand On Est Trois. 

                                                                                                                                                               

 

                                                 

 

 

 

On aimerait que tu nous écrives une opérette.

Pardon ?

Une opérette. Pour nous. Que tu l'écrives.

Moi une opérette ? Mais oui, pourquoi pas ? Une opérette ! Hop ! hop ! Rien que le mot. Trompette, tripette, escampette… Ah oui une opérette, vite ! Fuir l’esprit de sérieux qui est partout et que j’abhorre. Une opérette ! Maintenant ! Tout de suite ! Merci de me proposer d’écrire une opérette, Emmanuelle, Pierre et Gilles ! Je n’en ai jamais écrit d’opérette mais apparemment vous ne le savez pas, tant pis c’est dit et si c’est dit c’est dit ! Bon alors vous avez une idée de quoi elle pourrait parler cette opérette ?  

Nous avons trois idées. 

(Ça chauffe ! Ça chauffe ! Jamais travaillé avec des chanteurs.) Oui ? Je vous écoute. 

D’abord, que ça se passe dans un Ehpad.

Un Ehpad ? Mais pourquoi pas ? Beckett en chansons ! Super idée ! allons-y ! 

Attends, attends, on a encore deux idées. 

Ah oui c’est vrai. Quoi d’autre alors ? 

Le tour de France. Parce qu’on est fans. Enfin pas Emmanuelle, mais nous oui. 

Mais pourquoi pas ? Pourquoi pas ? J’aime bien le vélo. Et la troisième idée ? 

Le problème des prothèses mammaires qui explosent. 

Le problème… des quoi ?

C’est arrivé. 

Ah oui mais c’est très difficile à traiter ça, le problème des prothèses mammaires qui explosent. Vous savez quoi ? On va partir de l’idée du tour qui passe devant un Epahd et que c’est la folie à l’intérieur parce qu’ils sont tous fanatiques de vélo. Vous en dites quoi ? 

Ouais, super idée. 

Super, ouais. 

Sauf la directrice qui n’aime pas le vélo. Ça l’intéresse pas du tout. 

Ah très bien. 

Bon alors c’est parti. 

Et c’est ainsi que les trois chanteurs repartèrent de leur côté et que l’auteur reparta du sien. Et que depuis les trois chanteurs attendent et que l’auteur écrit. (Ah oui mais c’est comme ça, je ne peux pas aller plus vite que la musique !)

Mais bon, tout va bien, encore un peu de patience… La pièce est folle, mais le genre l’exige. (Pas folle au point de faire fuir le public, amis producteurs, rassurez-vous.) Des rires en cascades, c’est tout ce que j’ai en tête. 

Rémi De Vos                                                              

 

Je vais mettre en scène cette opérette.

 
Et pour ce projet, c'est une evidence. Emmanuelle, Pierre et Gilles me donnent envie d'écrire. ( J'attends les autres avec gourmandise ! ). Pourquoi se priver de ce qui arrive en répétition ? Les trouvailles, les imprévus, les accidents ? Réécrire, retoucher en direct. Laisser une part à l'improvisation, libre court à notre fantaisie, délirer peut-être. Cela nous permettra de rencontrer les personnages, de pousser des situations jusqu'à l'absurde. En complicité avec François qui écrit la musique... c'est tellement important, la musique. C'est une opérette. Vive la musique !

J'aime travailler, moi. Les chanteurs travaillent, ils ne peuvent pas faire autrement. cela tombe bien, je suis pour une certaine précision qui ne s'obtient qu'en travaillant. J'écris des textes qui font souvent rire et le rire est une mécanique de précision qui demande beaucoup de travail. Je veux qu'il y ait du mouvement et que cela soit beau et fluide. Une danseuse viendra faire danser les corps, travailler ça et que cela soit beau aussi ...   

Voilà.    

Rémi De Vos            

 

C'est quoi une opérette ?

...c’est un p’tit opéra ? Comme un galopin l’est à une pinte d’Heineken ? ... Pas exactement. Ça ne tient pas à son format mais plutôt à l’alternance texte/musique, ce qui n’est pas le cas d’un opéra.
Je suis Francois Miquel, je suis clarinettiste, saxophoniste, pianiste et compositeur. J’ai joué énormément d’opérettes. Je ne peux décrire l’enthousiasme qui m’étreint à l'idée d’écrire une opérette contemporaine. Rêver que la musique ne quittera pas tout de suite le public une fois dans la rue. Créer l’assemblage de l’équipe : tellement excitant ! Le plaisir immense de s’exprimer dans un style imposé de « musique légère », qui va soutenir, appuyer, relever les scènes, les situations, les personnages, dans la joie, l’enthousiasme de la création collective ! Quel plaisir ! Quelle chance ! C’est la musique ! C’est la vie ! 

François Miquel                            

               

 

 

Alma de Villalobos

L’histoire de Rémi est un éventail d’émotions. Elle est drôle et émouvante. Il y a de l’amour, beaucoup de passion et du délire mais surtout de la fragilité dans les personnages.
Le rythme, si juste dans la composition musicale, poétique et vivante, rend l’histoire touchante par sa simplicité.
Oui, c’est une opérette contemporaine qui nous parle de la vie jusqu’à son dernier soupir.
Il n’y a pas d’âge pour aimer ni pour avoir des passions.
Vivons sans hésitation avec délire et passion, comme nous le montrent bien les personnages de la pièce, car le voyage est court !

 

 

 

Pierre Lebon 

 

De nombreuses portes conduisent au bureau de la directrice, aux cuisines, dans un couloir, permettent les en- trées et les sorties rapides. Convention théâtre de boulevard. 

MOUVEMENTS : 

LE MUR

Ce grand mur est en fait un paravent articulé en plusieurs pans de mur, qui permet de modifier l’espace sans pourtant sortir de la maison de retraite. Sensation de déjà vu permanent sans rien reconnaître ou retrouver à sa place.
On a donc la grande salle commune qui peut se transformer en couloir (l’espace se referme sur lui même et sur le comédien) qui peut se transformer en deux pièces séparées, ou se replier complètement sur lui même, mon- trant au spectateur l’envers du décor, et le plaçant à l’extérieur de la maison tout en observant les pensionnaires enfermés dans la salle commune au travers des fenêtres. (Cf images). Il y a d’autres possibilités.

LES PORTES

Les portes ouvertes donnent sur les bureaux la cuisine, un couloir. Une fois refermées les dé- cors peuvent être intervertis : la porte du couloir donne sur le bureau ou lorsqu’on ouvre la porte du bureau on arrive dans la cuisine, afin d’accentuer l’effet de brouille des pensionnaires. L’armoire a un faux fond. Les portes de l’armoire donnent sur des étagères où l’on range vaisselle et linge. Lorsqu’on l’ouvre on peut également tom- ber sur d’autres lieux ou espace oniriques : Venise, le tour de France, une forêt.

Les mouvements de décor sont une chorégraphie d’espaces qui peuvent être effectués à vu par les comédiens ou des techniciens. 

 

MUSICIENS

 

Les musiciens peuvent être en fond de scène c’est à dire commencer à jouer derrière les murs et comme une musique enregistrée et apparaître au moment des premiers mouvements de décor.

 

 

 

 

 

 

Les Tournesols

( extrait )


 
 CATHERINE
Ah Herbert ! Comment s’est passé la nuit ? 
 
HERBERT 
La serrure de la porte de derrière a été forcée
 
CATHERINE
Quoi ? Mais qu’est-ce que c’est encore que cette histoire ? 
Quelqu’un a cherché à entrer dans l’établissement ? 
 
HERBERT 
Non, c’est le contraire. Apparemment, quelqu’un a voulu en sortir
 
CATHERINE
Qu’est-ce que vous racontez ? 
 
HERBERT 
La porte a été forcée de l’intérieur. La serrure est abimée, mais elle a tenu le coup
 
  Catherine le regarde. 
 
CATHERINE
Personne n’est sorti alors ? 
 
HERBERT 
En tout cas, pas par la porte
 
CATHERINE
La journée commence et déjà des contrariétés
Je ne sais pas comment je vais faire pour tenir
 
HERBERT 
Mauvaise nuit ? 
 
CATHERINE
Vous plaisantez, je n’ai pas fermé l’œil
J’étais dans mon lit, à suffoquer
Les draps étaient mouillés tellement je transpirais 
Je tournais, me retournais dans tous les sens
Impossible de trouver le sommeil
 
HERBERT apoplectique
Il fallait m’appeler 
Je serai venu
 
  Catherine le regarde. 
 
CATHERINE
Pourquoi faire ? 
 
HERBERT, pris de court
Je ne sais pas, nous aurions fait un scrabble 
 
CATHERINE
Un scrabble ? A trois heures du matin ? 
Non mais Herbert, il y a des fois où je me demande ce que vous avez dans la tête
Un scrabble, c’est totalement ridicule
 
HERBERT 
J’ai dit un scrabble, nous aurions très bien pu faire autre chose 
 
  Elle le regarde, étonnée.
 
CATHERINE
Et quoi donc ? 
 
HERBERT la fixe
Ce que 
vous auriez 
voulu 
qu’on fasse 
 
  Catherine le regarde, circonspecte 
 
CATHERINE
Vous êtes étrange depuis quelque temps, Herbert
Personne ne vous l’a encore fait remarquer ? 
 
HERBERT 
Non
 
CATHERINE
Vous ne semblez pas dans votre état normal 
Hier, vous m’avez littéralement agressée, vous vous rappelez ? 
 
HERBERT 
Moi ? 
 
CATHERINE
Vous voyez bien que vous n’êtes pas dans votre état normal
 
HERBERT 
Agressée ? Moi ? 
 
CATHERINE
Absolument
J’étais en train de vous parler, vous vous êtes jeté sur moi
 
HERBERT 
Vous m’entreteniez de quoi ? 
 
CATHERINE
Eh bien, je ne sais plus
Nous parlions des résidents à l’hôpital
  Elle réfléchit. 
De quoi parlions-nous ? 
Vous m’avez parlé de cette pauvre Geneviève
Je vous ai parlé de Pierre qui veut se rendre sur le rond-Point 
pour voir passer le tour de France !
  Herbert s’approche 
Avec la température prévue aujourd’hui
Il veut voir passer les coureurs du tour 
Plus rien d’autre n’a d’importance !
  Sabine entre. Ils ne la voient pas. 
Quelle folie ! Vous vous rendez compte ?
Le tour de France, Herbert ! Le tour de France !
 
  Herbert la prend dans ses bras et l’embrasse fougueusement.
  Catherine est saisie.
  Baiser interminable. 
 
SABINE
Décidemment 
 
  Herbert et Catherine se détachent brusquement. 
 
CATHERINE
Quoi ? Qu’est-ce que ? Oui ? 
 
SABINE
Excusez-moi si je dérange encore
 
CATHERINE, comme ivre
Ce n’est pas ce que vous croyez, Sabine
 
SABINE
Ce doit être une hallucination 
 
CATHERINE
Croyez-moi, je ne m’y attendais pas du tout
 
SABINE
Vous savez quoi ? 
Je crois que j’ai compris 
 
CATHERINE
S’il vous plait ? 
 
SABINE
Chaque fois que vous dites « Tour de France »
Herbert doit vous galocher, c’est ça ? 
 
  Catherine la regarde.
 
CATHERINE
Oui, Sabine ? 
Vous voulez quelque chose ? 
 
SABINE
Quand vous en avez envie, vous dites simplement « Tour de France » 
et Herbert
alors  
 
  Elle fait des petits coups de menton évocateurs.
 
CATHERINE
Herbert, dites quelque chose !
 
SABINE
Vous dites « Tour de France » et Herbert
Il doit comprendre 
C’est le signal
 
CATHERINE
Herbert !!
 
  Herbert la regarde
 
HERBERT 
C’est vrai ? 
C’est ça ? 
 
CATHERINE
Qu’est-ce que vous racontez ? 
Quelque chose ne va pas chez vous, Herbert
 
HERBERT 
Parce que quand vous dites « Tour de France » je ressens quelque chose
 
SABINE
Ah ! vous voyez ? 
 
CATHERINE
Mais enfin Herbert vous n’allez pas croire une chose pareille ? 
Quand aurions nous mis ça au point, vous pouvez me le dire ? 
Vous êtes fou, Herbert
Cessez ! 
  A Sabine
Qu’est-ce que vous voulez, vous ? Vous avez besoin de quelque chose ? 
 
SABINE
Je voulais prendre des nouvelles des résidents. 
 
CATHERINE
J’ai appelé tôt ce matin, la fille qui m’a répondue ne savait pas
Je vais rappeler l’hôpital de mon bureau 
Allez préparer le petit déjeuner, ça ne va pas se faire tout seul
  Sabine sort.
Quant à vous Herbert, je ne sais pas quoi vous dire 
La chaleur vous bout les sangs, je ne vois que ça
Allez voir si tout va bien, faites votre travail
Je ne veux pas vous voir de la journée
Allez, allez, sortez 

l